Avec Petit Hanneton, deuxième tome d’Atom Agency, Yann et Schwartz ressuscitent le polar noir, dans la tradition de Maurice Tillieux et de Gil Jourdan, dans une plongée au cœur des fifties.
Depuis la fin de la guerre, personne n’a revu Annette, la belle ambulancière : une héroïque “Rochambelle”, cette unité féminine intégrée à la 2e division blindée du général Leclerc. Cinq ans plus tard, c’est l’ébullition au 36 Quai des Orfèvres : le commissaire Vercorian est sur le point de coffrer l’ennemi public n°1. Alors quand un ancien compagnon de la 2e DB vient lui demander son aide pour retrouver Annette, il se débarrasse de l’affaire en vantant les mérites de son fils, le détective privé de l’Atom Agency.
Yann nous offre une aventure qui lancent nos héros Atom, Mimi et Jojo à la recherche d’une héroïne de guerre dénommée Rochambelle. Entre un vrai travail de fourmis dans les archives et une enquête de terrain, dans les bas quartiers, rondement menée, le fil rouge est entrecoupé par des bribes, souvent humoristiques, de la vie privée du héros et de ses proches. Il se décentre également sur son père, le commissaire et ses propres enjeux et démons, épisodes non moins intéressants. Yann a ciselé des dialogues surannés, de la dentelle old school d’argot coloré qui sent bon le Audiard et on adore. On s’y exalte, on y exulte, jure, peine, souffre, bref : on y vit ! Le Petit Hanneton fait quelques références aux Bijoux de la Begum, sans que la lecture du premier tome soit indispensable à la compréhension du récit, et tease déjà le tome 3 à venir.
Nous sommes transportés dès la couverture et les premières pages dans le trait rétro futuriste de Schwartz. Les tronches, les mines patibulaires, les regards déterminés des héros et le décalage humoristique mettent immédiatement le lecteur en mode nostalgie. Il serait toutefois réducteur de dire que tout tient de la référence et de l’hommage dans ses planches. Le traitement des couleurs est moderne : brillant et non mat. C’est beau. Et quels détails dans certaines cases ! Des scénettes s’y déroulent parfois en arrière-plan et on y compte nombre de clins d’œil, le tout insufflant un supplément de vie à l’œuvre. Saurez vous par exemple y trouver Gil Jourdan, lointain cousin détective d’Atom, ou Les pieds nickelés, les canailles magnifiques qui ne dépareillent pas dans l’univers de Yann et Schwartz ?
Un sens de la mise en scène indéniable, un humour omniprésent et bien dosé, des références historiques comme les malgré nous et l’Arménie, un langage d’époque documenté et des planches d’une grande maestria donnent à Petit Hanneton, deuxième tome de Atom Agency, un relief incroyable. Yann et Schwartz nous servent sur un plateau un scénario haletant et bien ficelé dans un écrin travaillé. Magistral.
Atom Agency #2
Petit Hanneton
56 pages
Editions Dupuis
Yann – Schwartz
Parution : 16 octobre 2020